Le 8 novembre, l’Amérique a clos l’une des campagnes présidentielles les plus laides de l’histoire récente, dont le résultat a stupéfié le monde et peut-être même surpris Donald Trump lui-même, puisque les sondages prévoyaient la victoire serrée de Hillary Clinton.
Maintenant, en cette période de transition, les ennemis et les amis du président élu Trump se réalignent à mesure que le corps politique international se prépare à affronter un leadeur imprévisible.
Tout au long de la campagne, les Arméniens sont demeuré confus puisqu’aucun candidat n’a offert beaucoup ; Hillary Clinton a démontré son insensibilité face aux questions arméniennes (tant lors de la signature des protocoles de Zurich en 2009 que de sa visite à Erévan en 2010), tandis que Donald Trump n’a même pas pris la peine de traiter des questions.
Maintenant, en tant que citoyens américains, nous devons accepter le verdict du public et faire preuve de respect envers le nouveau président qui, selon les sondages, a recueilli le vote de 70% des hommes blancs sans formation universitaire.
Il faut aussi s’inspirer des politiciens qui ont présenté leur allégeance après les élections, ce qui était pourtant loin des esprits, il y a quelques mois. Il y a deux cas particulièrement notables. Premièrement, le président de la Chambre Paul Ryan, qui n’avait jamais caché son mépris envers le candidat Trump. Tout à coup, il a annoncé que Donald Trump avait « entendu une voix que personne n’avait entendu avant lui. »
Ensuite, l’ancien candidat à la présidence et le gouverneur du Massachusetts Mitt Romney, au milieu de l’amnésie bienheureuse, a rencontré le président élu pour un « discours de fond », mettant de côté ses attaques vitrioliques contre Trump, pour le soutenir, alors que le mois dernier il avait qualifié ses idées de « ridicules » et « dangereuses ». Pour ce renversement de position, il a été récompensé en étant placé sur la liste restreinte de prétendants au poste de secrétaire d’État.
Les dirigeants du monde entier font la queue pour exprimer leurs félicitations et chercher les bonnes grâces de Trump. Le Premier ministre japonais Shinzo Abe a été l’un des premiers dignitaires étrangers à avoir une rencontre cordiale avec lui à sa résidence de la Tour Trump, en dépit des récentes tensions entre les deux pays. L’Europe a déjà connu le populisme de droite et se remet de ses effets. Elle est donc bien équipée pour faire face au « trumpisme » en Amérique.
Il peut sembler ironique que même le président Assad de Syrie ait annoncé lors d’une récente entrevue avec un journaliste portugais que le président Trump pourrait devenir un « allié naturel » s’il mettait en œuvre son engagement à lutter contre le terrorisme.
Les pays d’Europe de l’Est sont abattus en raison de la promesse faite par M. Trump d’améliorer les relations avec la Russie, et de redéfinir, d’autre part, le rôle de l’OTAN en Europe. On parle même de sa reconnaissance de l’annexion de la Crimée par la Russie.
Etant donné que l’Arménie est l’un des 193 membres des Nations Unies et l’un des plus petits, le président élu n’a certainement même pas pris la peine d’envisager une politique à son égard.
Cependant, la position internationale de l’Arménie a souffert parce qu’elle est considérée comme un satellite de la Russie. Par conséquent, la douleur infligée à l’Arménie politiquement ou économiquement relève plutôt de comment contenir la Russie. S’il y a un relâchement des relations entre les deux pays, le résultat sera certainement profitable à l’Arménie.
Certaines des nominations de M. Trump devraient, d’autre part, inquiéter tant les Arméniens, que tous les citoyens américains parce que ceux-ci incluent des racistes et des xénophobes. Ses choix, ainsi que ses déclarations politiques, ont secoué « l’establishment » républicain.
Nicholas Kristof a décrit dans le New York Times la politique mise en forme par Trump : « Les premiers signes de ce à quoi peut ressembler l’administration Trump : Un homme associé à la suprématie blanche et la misogynie comme stratège en chef de la Maison Blanche ; Un homme rejeté par jugement à cause d’un prétendu racisme sera procureur général ; Et un islamophobe qui a reçu de l’argent de Moscou [et d’Ankara] sera conseiller à la sécurité nationale. »
L’allégation de racisme est dirigée contre le sénateur Jeff Sessions. Toutefois, Mark Krikorian garantit le contraire : « Il n’y a personne dans le pays mieux qualifié pour être procureur général que Jeff Sessions. Sa probité et sa droiture sont hors de question. »
Nous n’avons pas encore trouvé de soutien semblable pour le lieutenant général Michael Flynn, un agent de renseignement à la retraite, que Trump a utilisé comme conseiller à la sécurité nationale. Au contraire, il y a des faits alarmants sur son caractère et sa conduite dans l’article précité : « En effet, pour un agent du renseignement, Flynn semble avoir du mal à distinguer la vérité du mensonge… lorsqu’il était au gouvernement, ses subordonnés avaient un nom spécial pour ses délires : ‘L’effet Flynn.’ »
Particulièrement préoccupants sont les liens étrangers de M. Flynn qui devraient concerner tous les Américains, comme le fait remarquer M. Kristof : « Un autre problème est le lien de M. Flynn avec les gouvernements étrangers. Il a pris de l’argent de la Russie pour assister à un évènement à Moscou, un siège près du président Vladimir Poutine. Il semble aussi avoir reçu de l’argent d’intérêt turc, sans le divulguer publiquement, a écrit un lecteur.
Cet article a été publié le 8 novembre, jour du scrutin, sous le titre « Notre allié, la Turquie est en crise et a besoin de notre soutien. » Dans son article, Flynn préconise que la Turquie lutte contre l’EI et mérite notre soutien, et qu’il faudrait extrader Fetullah Gülen en Turquie.
Cela semble être l’une des illusions de M. Flynn. Ou bien il ne sait pas que la Turquie a armé, formé et abrité des terroristes de l’EI, ou il vend la politique américaine à bas prix. Dans les deux cas, il prouve qu’il est dangereusement non qualifié pour le poste.
En tant que conseiller à la sécurité nationale du président, il occupera une position très délicate. Même si M. Trump respecte sa promesse d’améliorer les relations avec Moscou, le facteur Turquie apparaîtra toujours et M. Flynn, étant redevable aux intérêts turcs, pourrait jouer un rôle très dangereux. En outre, selon la tradition actuelle, après une période sous mandat, il peut reprendre son rôle en tant que lobbyiste pour la Turquie et de l’argent comptant pour ses services rendus pendant son mandat à la Maison Blanche.
Donald Trump sera notre président par la volonté du peuple. Il a le droit d’avoir le temps de mettre en œuvre sa politique et il mérite notre respect pour cela.
Le président élu rendrait un bon service à son pays en jetant un regard acerbe sur son choix avant toute nomination finale.
Sinon, il plantera une bombe à retardement dans son bureau.
Traduction N.P.
Edmond Y. Azadian