Alors qu’elle achetait, comme à son habitude chaque semaine, sa revue préférée, à la tabagie prestigieuse et si bien entretenue qui se trouvait à côté de chez elle, et au moment où le caissier lui remettait, avec précaution, la monnaie qu’il lui devait, après avoir payé le prix, une pièce métallique de dix cents s’échappa de sa main et glissa du comptoir pour tomber par terre à ses pieds.
Voyant des personnes attendre après elle pour passer à la caisse, elle se pencha précipitamment pour ramasser la pièce égarée. Toutefois, en la cherchant, une autre pièce argentée, plus luisante, ayant presque la même grandeur, à quelques centimètres de distance de la première, capta par sa lueur son regard.
Elle saisit d’abord sa pièce de monnaie, avant de tendre la main vers la deuxième, dont la forme ressemblait à une poire minuscule. En la fixant attentivement, à la lumière éblouissante du magasin, elle réalisa que c’était une icône en argent dont les reliefs saillants représentaient la Sainte Vierge debout, à ses pieds une personne agenouillée, ainsi que d’autres gravures miniatures qu’elle ne put pas identifier.
Traversant, depuis un certain temps, des moments difficiles qui s’accumulaient et risquaient d’être si menaçants et d’avoir des conséquences fatales et irréversibles sur sa vie, elle se réjouit d’avoir trouvé un signe qu’elle considère si significatif et encourageant en de telles circonstances. D’autant plus que les propriétaires de la tabagie et leurs employés étaient des non-chrétiens, ainsi que la plupart de leurs clients.
En plaçant soigneusement l’icône dans sa poche, de peur qu’elle ne s’échappât d’entre ses mains, elle sentit une joie intense et un bonheur immense remplir son âme et constituer une sorte de rempart solide entre elle et tout ce qui perturbait sa confiance, son équilibre et son bien-être. En quittant la tabagie, elle avait même l’impression qu’elle flottait dans l’air. Elle voulait, cependant, savoir quelle Vierge représentait la gravure et quelle était son histoire!
En attendant de percer le mystère, elle n’arrêtait pas de raconter l’histoire de la trouvaille à son entourage qui partageait les mêmes convictions qu’elle. Le lendemain, qui était un dimanche, elle se rendit à l’église en ayant la ferme intention de faire part au prêtre de sa précieuse découverte de la veille. L’occasion ne le permit, pourtant, pas. Toutefois, une rencontre inattendue avec une de ses connaissances, une si belle jeune fille talentueuse qu’elle estimait beaucoup, lui permit de découvrir que les reliefs, non identifiés, de l’icône étaient ceux de trois personnes agenouillées et non pas d’une seule, comme elle le croyait. Toutes les deux, ensemble, réussirent, également, à déchiffrer certains caractères de l’écriture si minuscule qui se trouvait à l’endos de l’icône. C’était du latin. Elles purent, cependant, lire le nom de « Fatima » qui renvoyait immédiatement à la mémoire la fameuse histoire des apparitions de la Sainte-Vierge, avant la fin de la Première Guerre mondiale, et plus précisément en 1917, aux trois enfants du modeste village portugais de Fatima au nord de la capitale Lisbonne.
À la lumière de cette découverte, un parallèle spontané s’imposa à son esprit entre le souvenir des apparitions de Fatima à un moment pénible et fatidique de son histoire, et la trouvaille de l’icône qui les symbolise à un tournant si douloureux et décisif de sa vie. Simple coïncidence ou véritable allusion! Seul le temps le tranchera.
Amal M. Ragheb
Journaliste internationale et écrivaine
amragheb2@gmail.com