Les archives du Vatican révèlent des aspects méconnus du génocide de 1915 : les tentatives du pape Benoît XV et la responsabilité des Jeunes-Turcs. L’historien allemand Michael Hesemann s’est penché sur la tragédie du génocide arménien durant laquelle entre un million et un million et demi de chrétiens ont été massacrés. Interrogé par Aleteia, il explique avoir découvert une lettre intitulée « Persécution des Arméniens » alors qu’ils faisaient des recherches sur la vie d’Eugenio Pacelli, le futur pape Pie XII.
Suivant cette piste, l’historien retrace les tentatives désespérées du pape Benoît XV. Le Souverain Pontife a écrit au sultan Mehmet V pour plaider la cause des Arméniens. Mais celui-ci ne semble même pas avoir lu la lettre. Le délégué apostolique à Constantinople, Mgr Dolci, a fait tout son possible pour interférer diplomatiquement, mais il s’est heurté à un mur. Il a fini par obtenir une audience, avec l’aide des ambassadeurs autrichiens et allemands, mais seulement quatre semaines plus tard, alors que la majorité du massacre était déjà réalisée. On lui a promis alors que la tuerie cesserait, que les déportés pourraient rentrer chez eux ou que tel ou tel groupe de chrétiens serait épargné : autant de mensonges.
« Il n’y avait aucun fanatique musulman parmi les responsables politiques. Les Jeunes-Turcs étaient tout sauf des fondamentalistes. Ils étaient jeunes, c’étaient des étudiants révolutionnaires qui, pour la plupart, avaient fait leurs études à Paris où ils avaient découvert les idéaux de la franc-maçonnerie et du nationalisme européen. Beaucoup d’entre eux étaient admis dans les loges maçonniques et, de fait, la loge de Thessalonique est devenu leur quartier général. » Pour appuyer cette affirmation, l’historien rappelle que Talaat Bey, le ministre de l’Intérieur turc en 1915, l’homme responsable du génocide arménien, était le grand maître du Grand Orient turc.
Plus que le fanatisme religieux, c’est un « proto-fascisme » qui aurait été à l’œuvre chez les Jeunes-Turcs, selon le Dr Hesemann, où l’unité de la nation ne serait pas réalisée par la pureté de la race, mais par celle de la religion, en l’occurrence l’islam sunnite.
« L’islam est instrumentalisé pour des raisons politiques. Il y avait en arrière-fond une idéologie, à savoir que les nations homogènes étaient des nations fortes et qu’il fallait rendre la nation turque homogène. »