Écrit en anglais par Souren Sargissian et publié dans The Armenian Mirror-Spectator en date du 26 novembre 2024
L’administration Biden a activement joué le rôle de médiateur dans les efforts visant à normaliser les relations entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, ainsi qu’entre l’Arménie et la Turquie. Ces deux situations sont étroitement liées, que cela nous plaise ou non. Le président sortant Joe Biden a exhorté le président azerbaïdjanais Ilham Aliev et le premier ministre arménien Nikol Pachinian à finaliser un accord de paix d’ici la fin de l’année, probablement dans le but de renforcer sa réputation de médiateur et de négociateur. Si Harris avait gagné, la politique des démocrates aurait probablement continué, mais cette perspective semble peu probable avec Trump.
Aliev n’a probablement pas tenu compte de la lettre de Biden, car l’Azerbaïdjan n’est pas favorable à un traité de paix qui limiterait ses ambitions et limiterait ses options. Contrairement à l’Azerbaïdjan, l’Arménie doit de toute urgence signer un accord de paix et ce le plus rapidement possible.
Il est probable que les dirigeants arméniens concentreront ensuite toutes leurs ressources sur les processus politiques intérieurs, comme l’organisation d’élections pour légitimer l’accord de paix et autres concessions douloureuses. Ces concessions pourraient inclure le renoncement à certains éléments de la Déclaration d’indépendance, à l’image symbolique du mont Ararat sur les armoiries arméniennes et à d’autres valeurs nationales et historiques.
En réalité, deux scénarios se présentent concernant le processus de paix.
Retarder l’accord de paix
L’administration Trump pourrait hésiter à finaliser rapidement l’accord, car cela impliquerait de créditer l’administration Biden, ou du moins de partager ce crédit avec les démocrates. Alternativement, Trump pourrait poursuivre les négociations et retarder la signature pour s’en attribuer le mérite, d’autant plus qu’il cherche à s’appuyer sur des récits de paix et des exemples de réussite pour étayer son bilan. Ce retard serait également conforme aux intérêts de Bakou, permettant à l’Azerbaïdjan de faire pression sur l’Arménie pour obtenir davantage tout en subissant moins de pression extérieure, en particulier de la part des États-Unis.
Implication limitée des États-Unis dans le Caucase du Sud
Un deuxième scénario implique que Trump ne s’implique pas ou peu dans le Caucase du Sud, laissant les initiatives régionales à la Russie, à la Turquie et à l’Iran. Ce scénario sert également les intérêts de Bakou puisque l’Azerbaïdjan ne subirait pas de pression extérieure et, contrairement à l’Arménie, serait capable de négocier avec succès avec Téhéran, Ankara et Moscou. Cependant, un tel scénario pourrait déstabiliser la région en éliminant les États-Unis comme acteur d’équilibre, augmentant ainsi l’influence des puissances régionales dominantes comme la Russie, la Turquie et l’Iran. Ce scénario semble plus ambitieux, en particulier si Trump négocie un accord avec Poutine sur l’Ukraine. Un tel accord comprendrait probablement un ensemble complet de mesures tenant compte des intérêts et des préoccupations mutuelles de la Russie à l’échelle internationale, y compris la région du Caucase du Sud, d’une importance stratégique pour la Russie.
Mais si l’on considère la situation dans une perspective plus globale, notamment dans le contexte des relations entre les États-Unis et la Russie et dans le contexte du Caucase du Sud, il existe une autre possibilité : les tensions accrues autour de l’Iran pourraient transformer la région en un « passage obligé », avec toutes les conséquences négatives que cela implique. Si la Russie et les États-Unis ne parviennent pas à un consensus sur l’Ukraine et que Washington prend des mesures plus agressives contre l’Iran, l’Arménie sera confrontée à de nouveaux et profonds défis, notamment dans le domaine de la sécurité. Ce serait le plus grand défi auquel l’Arménie devra faire face après la guerre en 2020.
Ces évolutions potentielles dépendront en grande partie des priorités et des politiques de l’administration Trump dans la gestion des affaires régionales et internationales en général. Il est difficile de prédire les actions futures en raison du silence de Trump sur la question. La situation est encore compliquée par la récente rencontre entre Trump et Biden, au cours de laquelle Biden aurait cherché à persuader Trump de soutenir l’Ukraine. Cependant, peu après la rencontre, Biden a autorisé le déploiement de missiles américains à longue portée contre la Russie, ce que le fils de Trump a critiqué comme une « décision imbécile ». Cela suggère qu’ils ne sont pas parvenus à un accord sur cette question.
Traduction N.P.