Pourparlers de paix entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan au sommet de l’OTAN

Écrit en anglais par Souren Sargissian et publié dans The Armenian Mirror-Spectator en date du 20 juillet 2024

 

Du 9 au 11 juillet, les États-Unis ont accueilli le sommet de l’OTAN célébrant le 75e anniversaire de l’organisation. Son objectif était d’unir les 32 États membres de l’Alliance pour relever les urgents défis mondiaux. Le sommet a été organisé à un moment critique pour l’organisation, alors que l’OTAN traverse une dynamique géopolitique complexe et réaffirme son engagement en faveur de la sécurité collective. Le sommet constitue donc un tournant stratégique pour garantir la pertinence future de l’OTAN. Il existe également un certain nombre de questions qui ne figuraient pas à l’ordre du jour de l’OTAN, mais qui façonnent néanmoins les défis géopolitiques de l’avenir. Ce sont les prochaines élections présidentielles aux États-Unis et dans l’Union européenne (UE) qui influenceront sans aucun doute la nature future de la coopération transatlantique.

L’ordre du jour du sommet a été révélé uniquement quelques jours avant son ouverture et se concentrait sur trois questions cruciales soulignées par le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg. Le premier point consistait à renforcer la défense et la dissuasion alliées : cela reste « le cœur du métier de l’OTAN », visant à renforcer les capacités de défense collective face à l’évolution des menaces à la sécurité. Deuxièmement, le soutien à l’Ukraine : reconnu comme le point le plus urgent à l’ordre du jour, l’OTAN apportera un soutien inébranlable à l’Ukraine et « contribuera à jeter un pont vers la future adhésion du pays ». Troisièmement, il existe le renforcement des partenariats mondiaux : en mettant l’accent stratégiquement sur la région Indopacifique, l’OTAN cherche à approfondir ses alliances avec des pays comme l’Australie, le Japon, la Corée du Sud et la Nouvelle-Zélande « pour renforcer la vision de paix, de sécurité et de prospérité dans ces pays », des régions profondément interconnectées.

Bien entendu, il pourrait sembler que le sommet de l’OTAN n’a rien à voir avec l’Arménie et l’Azerbaïdjan, mais ce n’est pas le cas. L’administration Biden a invité les ministres des Affaires étrangères des deux pays à promouvoir des pourparlers de paix entre Erévan et Bakou. Aucun accord significatif n’a été conclu lors de la réunion, mais ce qui a suivi est crucial. L’administration Biden et l’Occident se sentent sous pression en raison des prochaines élections de novembre, alors que les chances de victoire de Trump augmentent. Les membres européens de l’OTAN s’inquiètent de l’avenir de l’organisme si Trump est réélu et s’efforcent donc de résoudre les problèmes durant le mandat de Biden, craignant de baisser les bras face à la Russie sous sa présidence.

La réconciliation entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan fait partie des intérêts fondamentaux des États-Unis et de l’agenda de l’OTAN. L’amélioration des relations entre les deux pays entraînera une diminution de l’influence russe dans le Caucase du Sud, qui a toujours été la priorité de longue date des États-Unis et de l’Occident. En outre, l’intérêt explicite de l’Arménie pour le renforcement et l’approfondissement des liens avec les États-Unis et l’Union européenne offre aux États-Unis une occasion de capitaliser sur ces développements.

La réconciliation dans les relations arméno-azerbaïdjanaises étant une priorité de la politique étrangère américaine, les ministres des Affaires étrangères arménien et azerbaïdjanais ont été invités au sommet de l’OTAN à Washington. C’est ce qu’a annoncé le secrétaire d’État adjoint James O’Brien lors de sa visite à Bakou. Avant le sommet, il n’y avait aucune déclaration officielle confirmant d’éventuels pourparlers de paix entre les ministres des Affaires étrangères arménien et azerbaïdjanais, sous la médiation des États-Unis, lors des événements de l’OTAN. Cependant, le porte-parole adjoint principal du Département d’État, Vedant Patel, a assuré que des efforts étaient en cours. Lors du point de presse, interrogé plus précisément sur l’organisation de pourparlers de paix entre les ministres des Affaires étrangères arménien et azerbaïdjanais, il a répondu que « c’est une priorité pour nous, une priorité pour le secrétaire et d’autres responsables de ce département. Je n’ai aucun doute que c’est quelque chose sur lequel nous continuerons à travailler. Réunions et engagements spécifiques en marge du sommet, je ne veux tout simplement pas parler du calendrier pour l’instant. » Ainsi, les États-Unis étaient ouverts à leur intention de plaider en faveur d’un accord de paix entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, une position qui ressort clairement du discours officiel de haut niveau.

Lors d’une audition à la Chambre des représentants fin juin, le secrétaire d’État adjoint James O’Brien a souligné qu’ils « sont très clairs avec le président Aliev sur le fait que le moment est venu de faire la paix ». Il a ensuite réitéré le même message dans sa déclaration officielle à l’issue de ses entretiens à Bakou avec le président azerbaïdjanais Ilham Aliev et le ministre des Affaires étrangères Bayramov : « Les États-Unis souhaitent une relation forte avec l’Azerbaïdjan. Nous saluons un leadership audacieux pour conclure sans délai un accord de paix avec l’Arménie. Cet effort concerté a mis en évidence l’engagement des États-Unis à faciliter la stabilité et la paix dans la région ainsi qu’à diminuer l’influence de la Russie par le biais d’un engagement diplomatique. Conformément à leurs intentions, le secrétaire d’État Antony J. Blinken a accueilli le 10 juillet à Washington, en marge du sommet de Washington de l’OTAN, des pourparlers de paix entre le ministre arménien des Affaires étrangères Ararat Mirzoyan et le ministre azerbaïdjanais des Affaires étrangères Jeyhun Bayramov. Le secrétaire d’État Blinken a noté que l’Arménie et l’Azerbaïdjan « sont sur le point de parvenir à un accord final, un accord que les États-Unis soutiendraient fortement ».

Mais la déclaration du porte-parole du Département d’État américain Matthew Miller, le 16 juillet, a été vraiment choquante. « Nous pensons qu’un accord est possible, mais cela nécessite que les deux parties fassent des choix difficiles et des compromis difficiles, et donc ce que nous allons faire, c’est continuer à les pousser à résoudre ces dernières divergences et à parvenir à un accord », a déclaré le porte-parole.

Il s’agit d’une formulation vraiment exceptionnelle, ce qui signifie qu’une énorme pression a été exercée sur l’Arménie à Washington DC pour qu’elle fasse des concessions supplémentaires et qu’elle fasse des choix et des compromis difficiles, car il est difficile d’imaginer pourquoi Bakou devrait faire des concessions aussi difficiles.

Ainsi, le sommet de l’OTAN à Washington a marqué un moment charnière pour l’alliance, non seulement parce qu’il a célébré son 75e anniversaire, mais aussi parce qu’il a abordé des défis mondiaux urgents. Parmi les principales priorités de l’OTAN, les États-Unis plaident en faveur d’un accord de paix entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, le reconnaissant comme l’une des priorités de leur politique étrangère. Le Département d’État américain a travaillé activement pour parvenir à un accord de paix final et poursuivra probablement ces efforts en profitant d’une telle opportunité, car l’Arménie est prête à faire davantage de concessions.

 

Traduction N.P.