La Russie détient la clé du déblocage du conflit du Karabagh, bien que ses motivations soient motivées autant par son désir de conserver son statut régional dominant que pour résoudre le problème, indique le rapport du centre d’analyse américain Stratfor.
Selon Stratfor, société privée américaine qui œuvre dans le domaine du renseignement, puisqu’aucun progrès n’a été réalisé dans les pourparlers, les chances de reprise des hostilités entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan demeurent élevées.
Le but de l’Azerbaïdjan est à tout le moins de contester le statu quo politique et sécuritaire du Karabagh, alors que l’objectif de l’Arménie est de maintenir la situation actuelle.
« Les positions inflexibles de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan ont créé une impasse dans les négociations, mais il y a un troisième joueur crucial à prendre en compte : la Russie. Bien que les positions de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan soient claires, la motivation de la Russie dans le conflit est beaucoup plus complexe ».
Dans un sens plus large, le principal intérêt de la Russie pour l’Arménie et l’Azerbaïdjan – et tout le long de l’ancienne périphérie soviétique – est de renforcer son influence. Selon l’auteur, la Russie a « accompli cela en Arménie », mais elle aimerait se rapprocher de Bakou. Durant les évènements d’avril 2016, la Russie a adopté une attitude neutre « plutôt que de soutenir son allié arménien tant militaire que politiquement. »
« Réaliste, l’escalade azerbaïdjanaise n’aurait pas pu se poursuivre sans au moins une compréhension tranquille de la part de la Russie. Bien que Moscou intervienne pour empêcher que les combats ne se transforment en un conflit à grande échelle, le message a été envoyé que Bakou avait plus de marge de manœuvre dans la région et qu’Erévan ne pouvait pleinement compter sur Moscou pour garantir sa sécurité.
L’article note également que la Russie favoriserait le plan dit de Lavrov, en vertu duquel l’Arménie céderait cinq de ses sept régions entourant le Haut-Karabagh à l’Azerbaïdjan en échange d’une force de maintien de la paix dirigée par la Russie. Mais le gouvernement arménien s’opposerait fermement à un tel plan. « Si la Russie veut en fait ce plan, il pourrait explorer des options pour surmonter l’opposition d’Erévan. Il pourrait permettre une autre escalade militaire de l’Azerbaïdjan faisant ainsi pression sur l’Arménie afin d’obtenir des concessions. Moscou pourrait également utiliser ses liens politiques substantiels au sein du gouvernement arménien pour influencer un changement dans la pensée d’Erévan. »
Il est également mentionné que bien que la Russie ait développé « des liens étroits avec plusieurs personnalités gouvernementales (y compris les ministères des Affaires étrangères et de la Défense) et des dirigeants de l’opposition politique qui pourraient être plus enclins à accepter les vues de la Russie, lorsqu’il s’agit du Karabagh, » les Arméniens ne peuvent tolérer un tel accord.
En ce qui concerne la deuxième option, la possibilité d’une nouvelle escalade militaire de la part de l’Azerbaïdjan est dangereuse, car elle risque d’être hors de contrôle, et la Russie pourrait ne pas être en mesure de contrôler la violence au Haut-Karabagh.
« Il se peut même que la Russie veuille donner à l’Azerbaïdjan l’impression qu’il pousse l’Arménie à obtenir des concessions politiques, même si ce n’est pas exact. Dans ce cas, le plan de Lavrov représenterait une avenue pour Moscou, qui poursuit déjà une coopération militaire plus étroite et des accords d’armement avec l’Azerbaïdjan, afin de développer des liens plus étroits avec Bakou sans porter atteinte à la position du gouvernement arménien. Cela aussi a ses risques : Maintenir indéfiniment le statu quo politique est une position intenable pour l’Azerbaïdjan, la Russie ne peut donc pas prolonger la question sans résultats concrets. Cela est particulièrement vrai dans la mesure où d’autres puissances régionales telles que la Turquie et l’Iran – quoiqu’actuellement distraits au Moyen-Orient – pourraient devenir plus actifs dans le Caucase et être en mesure de défier la domination russe dans la région.
En conclusion, l’auteur note que « la position de la Russie envers le Haut-Karabagh est sujette à des fluctuations en ce qui concerne son intérêt à plus long terme de maintenir son influence dans le Caucase. L’objectif ultime de Moscou est d’être d’une influence dominante sur l’Arménie et l’Azerbaïdjan, et il peut utiliser le conflit du Haut-Karabagh comme moyen de façonner sa position dans les deux pays. Ce sera un facteur clé pour stimuler l’évolution politique et sécuritaire du conflit, qui risque de devenir plus volatil dans les mois à venir. »